A
cette époque, il est proche de l'équipe de L'Express, qui
entame sa période flamboyante et se trouve brutalement plongé
dans une situation épouvantable. Il s'agit de lui imputer la responsabilité
de fuites qui, au sein du conseil de défense dont il est membre,
conduisent à informer l'Union soviétique d'éléments
concernant la politique de sécurité du pays. Ces fuites viennent
en fait d'un haut fonctionnaire. Lui est totalement innocent mais fait
l'objet d'une campagne ignoble. Il se sentira non seulement à juste
titre victime d'un complot, mais aussi particulièrement seul, car
trahi par Pierre Mendès France, qui ne l'a pas informé des
soupçons qui pesaient contre lui et qui n'a pas davantage informé
le général Koenig, alors ministre de la défense, qui
lui-même n'était pas soupçonné. A vrai dire,
il aurait eu un moyen éclatant de sortir de cette affaire rapidement,
car il n'assistait pas à l'un des conseils qui ont fait l'objet
de fuites. Une seule personne avait assisté aux trois séances
litigieuses : le président de
la République, mais il ne le dira pas pour ne pas avoir l'air de
mettre en cause René Coty, tout simplement parce qu'il voulait être
un jour investi par ce même René Coty comme président
du conseil. C'est pourtant René Coty qui refusera de lui confier
désormais les comptes rendus des conseils de défense, le
laissant humilié. A partir de ce moment-là, il croira pour
toujours ses ennemis « capables de tout » et ses amis incapables
de le défendre.
« C'est en soi-même que l'on trouve les ressources nécessaires
» : cette maxime dictée par ses éducateurs religieux,
devenue ô combien mitterrandienne, a trouvé une nouvelle fois,
en 1962, à s'appliquer. C'est, en effet, en lui-même qu'il
a dû chercher le moyen de resurgir, dans la volonté de tuer
à son tour celui qui voulait sa perte qu'il a puisé une nouvelle
force, sa volonté et l'aide de quelques amis qui sont réputés
lui avoir épargné le suicide au moment de cette trop fameuse
affaire de l'Observatoire, montage concocté dans les officines du
premier ministre d'alors, Michel Debré. Et qui faillit provoquer
sa mort, et physique, et politique. |